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5 Leçons surprenantes sur la guérison du traumatisme que la plupart des thérapies ignorent

  • Frédéric DAVID
  • 2 oct.
  • 6 min de lecture

Quand on pense à la thérapie pour un traumatisme, l'image qui vient souvent à l'esprit est celle d'un processus long et douloureux.

On s'imagine devoir déterrer le passé, revivre des souvenirs pénibles et analyser en détail chaque recoin de notre douleur pour espérer guérir.

Cette idée est si ancrée que l'on pourrait croire qu'il n'y a pas d'autre chemin vers la guérison que celui de la souffrance.

Pourtant, une autre approche existe, une approche radicalement différente qui se concentre non pas sur le "pourquoi" du problème, mais sur le "comment" de la solution.

Cet article explore cinq des idées les plus percutantes et contre-intuitives de la Thérapie Brève Centrée sur les Solutions (SFBT), une approche qui s'appuie sur l'espoir et l'avenir pour surpasser les blessures du passé.


1. On ne guérit pas en disséquant le problème, mais en construisant l'avenir souhaité.

Imaginez pouvoir guérir d'un viol violent sans jamais avoir à en parler en séance de thérapie. C'est l'histoire paradoxale mais vraie de Kimberly.

Des années après son agression, elle n'arrivait plus à embrasser son mari et se sentait déconnectée de sa propre vie.

Lorsqu'elle a consulté le thérapeute Elliott E. Connie, son objectif n'était pas de "traiter le traumatisme", mais quelque chose de beaucoup plus simple : "Tout ce que je veux, c'est être heureuse."

Une thérapie traditionnelle se serait probablement plongée dans les détails du viol. Mais la Thérapie Brève Centrée sur les Solutions (SFBT) part d'un principe radical : pour surmonter un problème, il n'est pas toujours nécessaire de se concentrer sur lui. Pensez à la perte de poids : est-il plus utile de se focaliser sur la manière dont on a pris des kilos, ou de tracer le chemin à suivre pour être en bonne santé ?

La SFBT parie sur la seconde option.

Ainsi, au lieu de fouiller dans la douleur de Kimberly, son thérapeute l'a aidée à décrire méticuleusement ce que serait sa vie si elle était "heureuse".

Au cours de cette conversation centrée sur l'avenir, Kimberly a elle-même réalisé qu'être heureuse signifiait, entre autres, pouvoir à nouveau serrer son mari dans ses bras.

Après cette unique séance, elle a commencé à le faire, progressivement, jusqu'à retrouver une intimité qu'elle pensait perdue.

Le plus incroyable ?

Elle a accompli ce changement monumental sans jamais prononcer le mot "viol" en thérapie.

La guérison n'est pas venue de la compréhension des origines de sa douleur, mais de la construction détaillée de l'avenir qu'elle aspirait à vivre.


2. Le langage n'est pas un outil de la thérapie, il EST la thérapie.

Contrairement à de nombreuses approches où le langage sert à décrire une réalité intérieure, la SFBT considère que le langage crée la réalité.

Le lieu même du changement, c'est la conversation.

Cette perspective amène une idée profondément contre-intuitive : le fait de raconter et de répéter des expériences traumatisantes en thérapie peut, en un sens très réel, "retraumatiser" le client à chaque narration.

L'alternative proposée par la SFBT est donc de ne pas utiliser le langage pour revivre le passé, mais pour construire l'avenir.

Le dialogue devient un espace de création où le client et le thérapeute façonnent ensemble "une description du moment où le client fonctionnera bien, malgré l'expérience traumatique passée".

En choisissant délibérément des mots qui décrivent un avenir de compétence et d'espoir, ils commencent à construire les voies neuronales et psychologiques pour que cet avenir existe, le faisant littéralement naître par le langage.


3. Le thérapeute doit devenir un "résilientologue", pas un "victimologue".

Jacqui von Cziffra-Bergs, une thérapeute sud-africaine confrontée quotidiennement aux victimes de crimes violents, propose un changement de posture radical : passer de "victimologue" à "résilientologue".

Une approche traditionnelle, en se concentrant sur les détails du crime et la souffrance, peut involontairement renforcer le statut de victime du client et épuiser le thérapeute.

Le "résilientologue", lui, se concentre sur les ressources, la force intérieure et la capacité du client à rebondir.

Je crois fermement que nous devons plutôt devenir des résilientologues et nous concentrer sur l'ingéniosité, la capacité d'adaptation, la force intérieure et la capacité à rebondir du client.

Prenons l'exemple de Jill, une mère qui a sauvé son bébé de huit mois d'un agresseur armé d'un couteau. Plutôt que de l'interroger sur sa peur ou les détails de l'agression, un "résilientologue" poserait des questions très différentes.

Questions de "Victimologue"

Questions de "Résilientologue"

Racontez-moi ce qui s'est passé ?

D'où vous est venu le courage de sauter à travers une porte vitrée ?

Comment vous sentiez-vous ?

Comment avez-vous réussi à rester calme ?

Qu'avez-vous vu, entendu, senti ?

Comment avez-vous eu l'idée de fabriquer un mensonge pour l'attirer dans la cuisine ?

Vous vous sentiez seule et effrayée ?

Si votre fils pouvait raconter cette histoire, de quoi serait-il le plus fier chez sa mère ?

Il s'agit de bien plus qu'un simple changement de questions ; c'est une intervention fondamentale qui recadre l'identité du client.

Elle fait passer son récit intérieur de "Je suis une victime à qui cela est arrivé" à "Je suis le protagoniste qui y a survécu".

Ce changement de questionnement ne nie pas le traumatisme, mais il amplifie l'expérience de la survie et de la bravoure.


4. L'espoir n'est pas un simple sentiment, c'est un ingrédient curatif.

Pour la SFBT, l'espoir n'est pas un agréable effet secondaire de la thérapie ; c'est un élément central et actif du processus de guérison.

Après avoir lu Viktor Frankl décrire comment les plus infimes lueurs d'espoir aidaient les prisonniers des camps de concentration à survivre, le thérapeute Elliott E. Connie a eu une révélation.

Si l'espoir est aussi puissant qu'il semblait l'être, alors nous devrions travailler sur des moyens de rendre l'espoir plus manifeste et de le placer au centre de la thérapie.

L'approche SFBT est donc fondamentalement "amie de l'espoir" (hope-friendly). Toute la conversation vise à découvrir des histoires de forces, de ressources et de succès passés pour nourrir l'espoir du client en sa capacité à construire un avenir meilleur.

Cet espoir n'est pas un concept abstrait ; la SFBT le cultive à l'aide d'outils concrets et pratiques.

On peut, par exemple, encourager les clients à rédiger des "lettres pour les jours de pluie", écrites lorsqu'ils se sentent bien pour se rappeler leurs forces dans les moments difficiles, ou à créer une "trousse d'espoir", une collection d'objets personnels qui rappellent au client ses raisons de vivre.


5. La clé du changement a été découverte par accident.

L'une des idées les plus révolutionnaires de la SFBT est née d'un sentiment d'impuissance. Dans les années 1980, l'équipe de thérapeutes de Milwaukee qui a développé cette approche travaillait avec une famille qui présentait "exactement 23 problèmes". Totalement dépassée et ne sachant par où commencer, l'équipe a eu une idée insolite : elle a demandé à la famille de se concentrer sur les choses de leur vie qu'ils voulaient garder identiques et de venir en parler à la séance suivante.

Le résultat fut stupéfiant. Lorsque la famille est revenue, elle a rapporté que de nombreux problèmes s'étaient résolus d'eux-mêmes. En se concentrant sur ce qui fonctionnait déjà et sur ce qu'ils souhaitaient préserver, le système familial avait commencé à s'auto-réguler positivement. Cette expérience a fait naître une idée qui allait bouleverser la thérapie : les clients peuvent s'améliorer sans même se concentrer sur le problème, mais en se focalisant sur ce qu'ils veulent pour leur avenir et sur les forces qu'ils possèdent déjà. La solution n'est pas l'opposé du problème ; c'est une construction entièrement nouvelle.


Conclusion : La guérison est une création, pas une excavation.

Ces cinq leçons dessinent une architecture de la guérison radicalement différente de celle à laquelle nous sommes habitués.

La Thérapie Brève Centrée sur les Solutions nous invite à cesser de nous voir comme des archéologues de notre propre douleur, creusant sans fin le passé à la recherche de fragments brisés.

Elle nous propose plutôt de devenir les architectes de notre avenir.

Chaque leçon est un outil : la vision de l'avenir souhaité est le plan directeur ; le langage est le matériau de construction ; le regard de "résilientologue" renforce les fondations de notre identité ; l'espoir est le ciment qui lie le tout ; et la prise de conscience que le changement peut survenir par accident nous libère de la tyrannie du problème.

La SFBT nous rappelle que même face aux traumatismes les plus profonds, les ressources les plus puissantes pour le changement se trouvent déjà en nous, attendant d'être découvertes et mises en œuvre dans l'édification d'une vie nouvelle.

Et si la clé de la guérison ne se trouvait pas dans l'analyse de nos blessures, mais dans la construction méticuleuse de l'avenir que nous désirons ?

 
 
 

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